Distance des plantations

Peut-on planter n'importe quoi et n'importe où ?

Nous sommes souvent interrogés sur cette délicate question par des lecteurs qui habitent la campagne ou même par d'autres qui possèdent un jardin en ville. Y a-t’il une règle à respecter ?


Les conflits à ce propos sont déjà bien nombreux et révèlent souvent une obstination acharnée.

Il n'est donc pas inutile de rappeler les principes que la loi impose en cette matière. On va voir aussi ce qu'en a pensé récemment un de nos tribunaux.

« Il n'est permis de planter des arbres à haute tige, dit l'article 35 du Code rural, qu'à la distance consacrée par les usages constants et reconnu; à défaut d'usages, à la distance de deux mètres de la ligne séparative pour les arbres à haute tige et à 50 cm pour les autres arbres et pour les haies vives. Quant aux arbres fruitiers, ils peuvent être plantés en espalier de chaque côté du mur séparatif des propriétés sans que l'on soit tenu de respecter aucune distance. »

Mais qu'est-ce qu'un arbre à haute tige ? Qu'est-ce qu'un arbre à basse tige ? Ce n'est pas la hauteur totale de l'arbre, contrairement à ce que pensent certains, qui permet de faire la distinction.
L'arbre à basse tige, c'est un arbre dont les branches commencent à pousser à peu près au niveau du sol. Par contre, un arbre à haute tige, c'est un arbre qui est destiné à ne voir pousser les branches qu'au-dessus du tronc, à une certaine distance du sol. En cas de discussions, quant à savoir s'il s'agit d'un arbre à basse tige ou à haute tige, c'est le tribunal qui tranchera le problème. On range évidemment parmi les plantations à basse tige les aubépines, les haies de charmes, les groseillers, framboisiers, ligustrum, ainsi que toute une série de la famille du sapin. Par contre, un peuplier, un pommier, un cerisier, un prunier et bien d'autres arbres à fruits sont des plantations à haute tige.

Quant aux « usages constants et reconnus », de quoi s'agit-il? Comment les connaître et les reconnaître? Car, par hypothèse, un usage, c'est une manière d'agir que la généralité des gens admet, mais qui ne résulte d'aucun règlement écrit. De là, bien sûr, toute la difficulté...
Deux voisins étaient en conflit à propos de ces usages. L'un des deux prétendait que dans l'arrondissement judiciaire de Huy, il existait un usage pour les plantations aux termes duquel il fallait simplement respecter « un espace de cinq pieds » par rapport à la limite des propriétés.

« Certes, déclarait le tribunal, l'article 35 du Code rural parle bien d'usages constants et reconnus. Cependant, encore faut-il prouver qu'un vieil usage serait toujours en vigueur à l'heure actuelle, et à défaut d'apporter cette preuve, il faut s'en tenir au recul prévu par la loi, c’est-à-dire 50 cm pour les plantations à basse tige et deux mètres pour les plantations à haute tige... »

Dans le cas d'espèce, les arbres n'avaient pas été plantés à la distance réglementaire, et le voisin demandait donc leur enlèvement. Cependant, le propriétaire des plantations s'y opposait en se prévalant de la prescription. « Il existe des procédés très scientifiques pour déterminer l'âge d'un arbre, déclarait encore le jugement. En déterminant l'âge de l'arbre, on ne peut cependant pas encore déterminer avec précision le moment où il a été planté, car certains arbres peuvent, au moment de la plantation, avoir déjà atteint un âge de plusieurs années... Or, ce qui compte pour apprécier la prescription, ce n'est pas l'âge de l'arbre, mais c'est le temps qui s'est écoulé depuis la plantation d'apparence irrégulière. »

« Le fait de demander l'enlèvement de plantations qui n'ont pas respecté le recul imposé par la loi, déclarait en outre le jugement, n'est pas un abus de droits. C'est tout simplement l'exercice d'un droit qui est reconnu par la loi... »

Que décide pratiquement le tribunal dans un cas semblable? Quels sont aussi les droits qui de toute façon restent à la disposition du voisin préjudicié même si le tribunal n'ordonnait pas l'enlèvement des plantations ?

Nous en reparlerons dans un prochain bulletin.